Dans le cadre du 6e forum mondial de l’eau qui se déroulera en mars à Marseille, la Ville de Rennes et le syndicat de production d’eau ont procédé à la signature du pacte d’Istanbul. Ce texte est à la fois un engagement et une reconnaissance.
Un engagement en faveur d’une position partagée communément par les autorités locales provenant du monde entier, faisant de la politique de l’eau, l’un des fondements du développement de leur territoire. Et quand on parle du territoire pour la ville de Rennes, il ne s’agit pas de ses limites communales, il s’agit aussi des territoires où la Ville puise ses ressources : je pense au Couesnon, à la Rance, au Coglais, à la Chèze, au Canut, à St-Grégoire, à Betton, à Chartres de Bretagne. De tous ces lieux, dispersés sur notre département voire au-delà, nous puisons une richesse, une capacité de développement économique ou démographique dont les effets positifs rejaillissent bien au-delà de Rennes et de son agglomération.
Rennes ne peut donc que souscrire au pacte d’Istanbul qui reconnaît l’interdépendance de l’utilisation de l’eau dans les zones urbaines et rurales. A l’opposition stérile ville/campagne, nous préférons les notions de coopération, de partenariats ou encore de redistributions.
Signer ce pacte c’est aussi reconnaître le travail déjà accompli. Cette signature est d’autant plus simple, que ce pacte s’inscrit dans la philosophie de notre action politique.
Ce pacte nous amène par exemple à privilégier une vision intégrée de la ressource en eau. Car s’occuper d’eau c’est aussi s’occuper d’agriculture, la mise en œuvre des périmètres de protection des captages en est un bel exemple, c’est aussi s’intéresser aux optimisations énergétiques, nos barrages –je pense là plus précisément à Rophémel- peuvent avoir plusieurs fonctions, c’est également se pencher sur la question de la restauration collective et favoriser les circuits courts pour trouver des débouchés aux pratiques agricoles les plus vertueuses, c’est construire une filière bois-bocage permettant la diminution des effets de transferts de phosphore, c’est s’intéresser à l’urbanisme et à la gestion des inondations mais aussi aux étiages les plus sévères, c’est amener les jardiniers à jardiner au naturel, à ne plus utiliser de produits phyosanitaires…
En bref, et comme vous pouvez le lire cette dimension « intégrée » de la gestion de la ressource en eau est pleinement au cœur des politiques rennaises.
Ce pacte reconnaît en outre toute l’importance de l’assainissement. Notre politique en la matière constitue un pan majeur de notre gestion du cycle de l’eau.
L’objectif poursuivi est l’atteinte du « bon état écologique » des milieux aquatiques. Avec, par exemple, la pose de collecteurs de stockage nous réduisons par deux les déversements directs dans le milieu naturel par temps de fortes pluies.
Je citerai également notre future unité de traitement des boues de l’usine d’épuration de Beaurade, mise en service à la fin de cette année, et qui sera exemplaire par sa technique dite d’oxydation par voie humide plus communément appelée OVH. Aujourd’hui, seules quatre collectivités à l’échelle européenne – Milan, Bruxelles, Epernay et Aix-en-provence – utilisent ce procédé. Cette construction sera une réussite environnementale et technologique à même de produire de l’électricité par méthanisation, mais aussi de produire un résidu totalement inerte valorisable demain dans différentes industries.
Cet investissement permet comme d’autres, d’utiliser les externalités négatives – les déchets, les boues en font partie- du fonctionnement d’une ville et de sa population, pour les valoriser et créer de nouvelles richesses. Inscrire nos villes dans ces démarches de développement durable, c’est conforter la place de l’homme dans son environnement, c’est répondre tout simplement au défi du 21e siècle.
Le pacte nous engage également à anticiper les changements climatiques, ceux-ci seront certainement moins difficiles à gérer ici qu’ailleurs dans le monde mais la ville de Rennes s’est engagée en mars 2009 à faire face à ces changements éventuels, à travers un programme d’économies d’eau pluriannuel. Avec le concours de l’Agence de l’Eau Loire-Bretagne et du Conseil Régional de Bretagne nous sommes décidés à atteindre une consommation moyenne de 110 litres par jour et par habitant et d’économiser 1,6 millions de m3 d’eau prélevée par an en 2020.
Concrètement, cela se traduit par la maîtrise des consommations municipales, celle-ci ont déjà diminué de 25% entre 2000 et 2009, avec des actions qui permettent un suivi affiné des consommations, une amélioration des pratiques des services, ou encore l’installation de matériel hydro-économe dans les 46 écoles de la Ville.
Mais ce programme s’adresse aussi à d’autres publics. Nous menons donc des actions de sensibilisation auprès des particuliers, des scolaires et des professionnels comme les commerçants, les hôteliers. Nous avons d’ailleurs, récemment, signé une charte d’engagement avec une trentaine d’établissements au sujet de ces économies d’eau.
Enfin, ce programme écodo vise à améliorer le rendement de nos installations pour économiser le prélèvement d’eau dans le milieu naturel.
Le pacte souligne aussi l’importance du contrôle par nos collectivités d’un bien –l’eau- qui est éminemment public et universel. Cela ne dit rien du mode de gestion à privilégier, mais invite les collectivités à exercer pleinement leur responsabilité. La délégation de service public ne doit pas rimer avec déresponsabilisation. Cela met au cœur de la réflexion la capacité des agents des collectivités territoriales à contrôler sur pièce et sur place, autrement dit financièrement et techniquement, les activités du délégataire. Ce n’est pas une question de méfiance entre l’autorité organisatrice et le délégataire mais réellement une question de responsabilité politique. Et si la Ville de Rennes a la capacité à employer plusieurs agents sur ces métiers, je sais qu’il n’en est pas de même partout, et encore plus depuis que l’Etat s’est désengagé de ce type de mission. Cette vigilance doit être partagée par tous et elle doit amener les collectivités compétentes à s’organiser en conséquence.
Enfin et pour répondre au caractère universel de l’eau, la Ville mène une politique axée sur le partage de ses valeurs à travers des actions de coopération décentralisée notamment avec le cercle de Bandiagara au Mali. En activant les possibilités de la loi Oudin-Santini, nous avons permis la construction du barrage de Yawa, la mise en place de forages, ou de bornes fontaines. Beaucoup de projets doivent encore aboutir, mais il est de notre responsabilité de partager une de nos richesses essentielles qui est notre excellence en matière de gestion hydraulique.
Reconnaissance de l’interdépendance des zones rurales et urbaines, importance des politiques d’assainissement, gestion intégrée du cycle de l’eau, exercice d’un contrôle public, nécessité de diffuser le savoir à travers nos coopérations internationales, voilà autant d’arguments qui font la force de la signature rennaise.